Texte que j'ai lu lors de l’inauguration de l’Étreinte
Ma démarche en art public
Dès que je suis en concours d’art
public, je commence par faire une recherche sur les lieux, l’histoire et
surtout je pense aux gens qui vont côtoyer l’œuvre quotidiennement. Je ne cherche pas l’effet spectaculaire
ou la provocation. Je me soucie davantage de l’intégration harmonieuse à
l’architecture, à l’environnement et à la vie des gens. Je me fais un devoir de
donner un sens et de transmettre des clés de compréhension accessible à tous.
Comme disait Paul Klee : ‘’ l’art ne reproduit pas le visible, il
rend visible ‘’. Pour ma part,
je tente de révéler plusieurs aspects d’un lieu - y faire écho. Je fais donc
une recherche d’images significatives selon le contexte une recherche de
repères identitaires pour les gens. Comme un miroir intérieur, je fais des œuvres publiques qui tentent de faire
vivre l’expérience sensible du présent et une expérience de l’être. Dans ce
cas-ci Etre le boisé
toussaint-Louverture.
La recherche sur le terrain
Ce projet d’art public aux HJM
m’a interpellé puisqu’il rejoignait en tout point ma démarche artistique. Le
bureau d’art public avait prévu une semaine de résidence, ici, aux HJM pour les
finalistes du concours. L’aspect
recherche s’est donc passé sur le
terrain.
J’ai pris part aux activités: mosaïque; séance de taïchi matinal ; jardin
communautaire…
-
J’ai quitté
le jardin communautaire avec des épinards rouges et quelques recettes du Bangladi.
-
Dans le
Boisé, des québécois qui habitent la tour m’ont raconté l’histoire de la
fameuse chouette qui est venue s’installer dans les arbres, un épisode
mémorable dessiné, photographié et aujourd’hui élément de la sculpture !
J’ai interrogé les résidents sur
ce que représentaient – Le boisé Toussaint-Louverture pour eux et ce qu’il
souhaitait pour l’œuvre à venir.
Les moins bons aspects :
-
un endroit sombre,
qui fait peur ou se tiennent des gens indésirables le soir
-
un endroit
ou les enfants ne vont pas ou y passent en courant
-
un parc ou
se tiennent seulement les gens plus âgées qui habitent les Tours d'habitation
-
Les bons aspects :
-
un endroit
calme
-
une oasis de
fraicheur
-
un ilot de verdure
avec des arbres magnifiques
Umé, une jeune Bangladesh que je
remercie pour ces bons mots m’a dit: Les
enfants ne vont pas de l’autre côté de la rue… ‘’Ça prend un pont inter générationnel !’’
J’avais là les bases pour
développer un projet et des idées pleins la tête.
Il fallait mettre en valeur la richesse
des lieux :
-
ce boisé et
ces arbres majestueux ;
-
la richesse de
la diversité culturelle ;
-
un lieu
invitant pour les gens de tout âge ;
-
un besoin de
se reconnaitre comme citoyen du Québec ;
-
Et finalement, faire traverser les gens les jeunes comme les moins
jeunes d’un côté à l’autre de la rue…
La réalisation du projet
Mon projet d’art public L’Étreinte a été retenu. C’est un
magnifique voyage multiculturel au cœur de Montréal qui a débuté avec une première
rencontre en décembre 2011. On m’a
offert un logement durant toute la durée du projet. À cet effet, je remercie la
Corporation des Habitations Jeanne-Mance (particulièrement Lucie Côté, Danielle
Juteau) et les différents organismes communautaires qui se sont montrés en tout
temps disponibles et généreux.
La réalisation de l’œuvre d’art l’Étreinte
résulte de rencontres auprès de gens qui ont collaboré au processus créatif. :
-
par l’écriture de souhaits offerts aux générations futures inscrit sur les
pierres ;
- par
la transmission de leur tradition artisanale dont on retrouve des éléments
découpés dans les grandes feuilles d’arbre en aluminium ;
-
par l’empreinte de mains des enfants et leur prénom gravés sur les
pierres ;
Les souhaits
Je remercie Christiane Côté, qui
offre les cours de français, qui m’a reçu à plusieurs reprises. Ces élèves et
les visiteurs de la Maison Théâtre (que je remercie aussi) ont contribué à
l’écriture de souhaits dont une sélection est à jamais gravée dessinant un
parcours sinueux sur les neufs pierres que l’on retrouve dans le parc - Souhaits offerts aux générations futures.
La transmission des traditions artisanales
Pour connaitre les traditions
artisanales, j’ai invité les étudiants de la classe de francisation à apporter des objets de leur pays : Cambodge, Bangladesh, Vietnam, Chine, Japon,
Ukraine, Russie, Rwanda… Julie; Fatima; Lihua Wang ; Mei ;
Jonathan ; Naomi ; Luba; Tatiana ; Anna; Ce sont ces objets
qu’ils ont apportés qui ont inspirés chacun des motifs que vous retrouvez dans les découpes des larges feuilles en
aluminium. Ces feuilles qui témoignent aujourd’hui de la beauté du Boisé,
de ces arbres et de la richesse de la multi ethnicité des HJM.
Ce fût un moment magique. J’étais
bien fière de ne pas instrumentaliser
les gens dans la réalisation du projet mais, bien leur permettre d’exprimer ce qu’ils sont. Ils étaient heureux de
partager leur tradition et je leur en suis fort reconnaissante. Ce fût un moment inoubliable,
merveilleux… à laquelle assistait Isabelle Riendeau, du bureau d’art public. J’en
profite aussi pour la remercier de son soutien et sa précieuse collaboration à
toutes les étapes du projet (à peu près un courriel par jour durant deux ans).
La gravure des mains
Je voulais aussi que les enfants
aient leur place dans cette œuvre, qu’elle leur procure un sentiment
d’appartenance. Je remercie à cet effet la Halte Garderie ; la CPE
macadam ; les directions des écoles qui m’ont facilité l’accès aux listes
et aux classes des enfants. Quelques 200 mains et prénoms d’enfants de deux
mois à 18 ans se retrouvent gravées à jamais sur les pierres parmi les souhaits
qui leur sont offerts.
Je remercie tous ceux qui ont
collaboré au projet ainsi que ceux qui ont contribué à la matérialité de
l’œuvre : Amélie Bélanger et Gabrielle Carrère Legault qui m’ont assisté dans la collecte des mains ; Jonathan Daigle
de Méto concept pour le travail de l’aluminium; Les graveurs de pierre -
Stéphane Ménard, Michel bédard et monsieur Gilles Brunet ; Lumi-Vert qui ont fait l’aménagement du
parc sous la direction de Éric Blouin ; l’arrondissement Ville-Marie; mes
amours Alexis, Maxime et François Giard toujours là près de moi.
En guise de conclusion, je vous laisse sur ces mots
Inscrire sa main
sur la pierre, c’est donné de l’espoir. C’est un signe inscrit dans le temps,
dans l’histoire. C’est aussi un signe évolutif. Cette main change et
grandit. Les enfants et un jour leurs enfants et petits-enfants vont revenir ici
comme un rituel. Ils poseront de nouveau leur main sur la pierre. - C’est moi,
c’est nous, c’est ma fille, c’est mon frère, c’est ma mère. L’expérience sera
ainsi renouvelée de générations en générations. Certains passants vont
s’attarder à toucher les mains, à centrer la leur sur l’une ou l’autre. Le
Boisé sera animé par ce jeu de va-et-vient, ce retour à soi, aux siens.
L’Étreinte ne fait pas ombrage à la nature environnante, au contraire, elle apparaît
sous différents angles à travers ces nombreux interstices comme autant de
petites fenêtres sur le paysage naturel et humain. L’Étreinte
invite à vivre une expérience du Boisé, une expérience vers soi et l’autre, une
étreinte amoureuse de la vie.
Voilà, merci mes amis d’être ici, merci à chacun de
vous!
Communiqué de la ville de Montréal
L'oeuvre d'art publique L'Étreinte de Luce Pelletier rend hommage à la diversité culturelle aux Habitations Jeanne-mance.
L'oeuvre d'art publique L'Étreinte de Luce Pelletier rend hommage à la diversité culturelle aux Habitations Jeanne-mance.
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